samedi 15 janvier 2011

Did I ask you too much, more than a lot?



Autant vous prévenir d'avance, c'est encore un texte qui sert à rien. Ca fait que si vous n'êtes pas d'humeur du dimanche matin, vous pouvez passer votre chemin. Comprendre par "humeur du dimanche matin": "le jour où vous vous dites que si c'est précisément ce jour-là qu'ils sortent les programmes télés, c'est pas pour rien, c'est parce que c'est précisément le seul jour où vous pouvez lire du début à la fin les interviews d'acteurs dont vous avez jamais rien eu à foutre ou les réponses d'un psy aux problèmes de parfaits inconnus".

Je me demandais: ça vous a jamais frappés, vous, à quel point les gens bornés peuvent avoir une vie terne et inintéressante? Vous avez jamais remarqué jusqu'à quel point l'intensité de conscience peut varier d'un être humain à un autre voire à un troisième?

Parce que certes, heureux les imbéciles, car au même titre que les nains, ils sont les derniers à savoir qu'il pleut (les uns à cause de la loi de la gravité, les autres parce qu'ils croient encore à la légende des oiseaux qui font pipi en vol). Oui, oui, les esprits supérieurs comme vous et moi, ils ont à dealer à longueur de journée avec leur petite voix intérieure qui peut pas leur foutre la paix cinq minutes et cesser un peu ses "Trouver du taff? Mais tu t'es crue dans les années 50 ma chérie!"; "bof, qu'est ce que tu t'en fous que ton voisin t'envoie la fumée de sa clope dans les naseaux, faut varier les causes de cancer entre ça et la voiture qui vient de démarrer sous ton nez"; voire pour les plus raffinés "ouais, t'as été vraiment très gentille sur le coup... genre, comme si t'avais pas fait ça juste pour m'entendre te dire que t'es très gentille".
Vous aurez compris l'idée.

Le truc qui a la classe, c'est qu'on a droit aux contreparties. Parce qu'une sensibilité et une lucidité exacerbées, ça vous ouvre la porte d'un monde de surprises et d'émerveillement à deux paupières de chez vous. Grâce à ça, un trajet en train que vous faites toutes les semaines peut être soudainement illuminé par le fait que vous ayez découvert la teinte de bleu la plus criarde qui ait jamais existé sur les volets d'une maison terne entre Carnot et Châteaucreux. Vous savez que vous avez un degré de conscience supérieur à la moyenne quand vous avez toujours été, pendant toute votre scolarité, le premier à remarquer qu'il neige en regardant par la fenêtre et que la première neige de l'année a toujours été pour vous porteuse d'une magie irremplaçable. Si le fait d'apprendre que la vague petite tâche un peu plus claire que j'ai vue un jour dans un coin de ciel nocturne d'Écosse était en fait une lointaine aurore boréale vous laisse indifférent, vous pouvez refermer cette page tout de suite. Si par contre vous êtes en train de vous exclamer tout seul devant l'écran "Wah, fuck, la chaaaance" (à moins que ce ne soit: "ben moi j'en ai vu une VRAIE, nette et tout, nananère"), là par contre, vous faites partie des élus capables d'apprécier la vie à sa juste valeur. Et je pense pourvoir affirmer que dans ce cas, vous êtes le genre de personne qui rigole régulièrement, ne serait-ce qu'intérieurement, toute seule dans la rue devant un détail incongru, comme par exemple ce restaurant qui affiche fièrement sur son ardoise "Menus gastros". Car l'acuité de conscience permet d'acquérir ce petit bijou qu'est un sens de l'humour acéré, sensible au second degré, à l'ironie, à l'humour noir et surtout à l'auto-dérision.
La preuve, c'est que je me vexerai même pas si quelqu'un résume ce message par "Ouais, en gros t'es aware et t'en es fière". Non, j'en rirai même.

La vie doit être triste pour les gens capables d'écouter cette chanson sans en avoir des frissons. Pour ceux qui ne peuvent pas se marrer au milieu d'une crise de larmes en pensant "Putain, je suis pathétique, c'est exactement une scène de film à l'eau de rose". Pour ceux qui n'ont jamais eu le coeur qui bat à 100 à l'heure et les mains moites juste en lisant un livre (d'ailleurs j'envisage de me réconcilier avec la fac de lettres depuis qu'elle m'a fait découvrir Tess d'Urberville et je m'étendrai surement plus longuement sur le sujet). Pour ceux qui, d'ailleurs, n'ont jamais eu l'impression qu'ils allaient finir par réveiller les voisins si leur cœur ne se décidait pas à battre un petit peu moins bruyamment. (Oui, j'ai un drôle de logement, les murs sont en papier. Pirouette cacahuète.)

Et pour ceux à qui ça ne fait ni chaud ni froid de découvrir qu'ils ont un colocataire habitant dans la douche juste sous prétexte que ce colocataire, ben en vrai c'est juste un crochet pour gants de toilette qui a une forme sympa.
Moi, je l'aime bien ce chaton, et après plusieurs mois sans lui trouver de nom suffisamment transcendant, je suis fière de pouvoir enfin vous présenter Gaspard, maintenant qu'il est baptisé.



"Pleased to meet you. I hope you guess my name."
Car maintenant, on le sait, "Gaspard de la Nuit serait...
-Eh! oui... le diable"

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